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D’ailleurs si l’épreuve est impossible pour beaucoup des traits rappelés par Quincey, l’épisode d’Anne d’Oxford Street sur lequel il était seul à pouvoir témoigner, — l’épreuve est au contraire facile dans certains cas. M. Page a par exemple publié de charmantes et très authentiques lettres de Quincey enfant, adressées à sa sœur Mary et signées par badinage Tabitha Quincey. Ces lettres sont écrites de Bath et rapportent sa maladie cérébrale dans cette villégiature. Elles confirment point par point les récits du Mangeur d’opium à ce sujet ; pas un détail n’est en divergence, pas même en ce qui concerne le début de sa liaison avec Lord Westport, le fils unique de Lord Altamont, plus tard marquis de Sligo, « un bien joli enfant… dans mon genre. « Le même M. Page a publié, d’une date quelque peu postérieure, des lettres adressées à madame Quincey. Le jeune homme y racontait avec esprit et littérature les incidents du voyage en Irlande fait avec Lord Westport. Or, s’il n’y raconte pas par le menu l’incident, Lady Errol — miss Blake, c’est que l’auteur des Souvenirs autobiographiques avait pris son parti de ce qui avait certainement beaucoup blessé l’adolescent. Pour le reste, paysage y compris, — ce qui prouve que Quincey avait l’impression photographique, — il n’y a pas un trait de la lettre qui ne se retrouve dans les Souvenirs.

Quincey n’a pas poussé ceux-ci au-delà d’Oxford, mais on en trouverait aisément la suite dans les pages qu’il a consacrées à certains types qui l’ont particulièrement préoccupé. Peut-être y aura-t-il un jour intérêt à traduire les portraits qu’il a tracés des Lakistes anglais dont il fut l’ami, le compagnon et un peu le jaloux. Si nous abordions cette tâche, nous trouverions Southey le bibliophile au milieu de ses livres, Wordsworth coupant les siens avec le couteau à beurre de