Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VII, 1857.djvu/193

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Non, vous ne rêvez que fumée,
Que lourds canons, tente de roi.
Vous aimez d’amour votre épée,
À vos côtés de sang trempée,
Plus que votre femme, cent fois,
Sous ses rideaux pâle et sans voix.
Avez-vous fait vos fiançailles
Avec Arcole ou Rivoli,
Avec la vierge de Lodi,
Ou la vierge des funérailles ?
Avez-vous donc mis votre anneau
Au doigt sanglant de vos batailles,
Pour les aimer jusqu’au tombeau
Plus que vos sœurs et que vos frères ?
Que vous font mes larmes amères ?
Sitôt que votre étoile luit,
On dit que, le jour ou la nuit,
Vous êtes, depuis mon veuvage,
Là-bas, un lion de carnage.
Que je voudrais, de mon balcon,
Sur votre cheval de bataille
Vous voir passer, quand le clairon
Aux lèvres d’or crie et tressaille ;
Quand une ville tout en deuil
Pour vous met ses clefs sur le seuil ;
Quand votre écharpe se déplie,
Et que les femmes d’Italie
Sous les orangers vont s’asseoir,
Disant : " Qu’il était beau ce soir ! "
Est-il vrai que dans la poussière
Sur vos épaules ruisselants,
Vos longs cheveux traînent sanglants,
Comme d’un casque la crinière ;