Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VII, 1857.djvu/269

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Des troupeaux sur sa cime, en ses flancs la tempête.
Toula peut voir sa base et Kalouga son faîte.
Dans son ombre, un vautour niche en toute saison,
Et la Bérésina blanchit à l’horizon.



XXXIV. LE VOYAGEUR

 
Mais, là-bas, non plus loin, dans la neige et l’hiver,
Voilà qu’un grand lion, à la griffe de fer,
Un lion au front chauve, errant sans sa lionne,
Seul, loin de son palmier que la foudre sillonne,
Balayant, sans rugir, la terre sous ses pas,
Cherchait son grand désert et ne le trouvait pas.
Mais, là-bas, non plus loin, dans la plaine homicide,
Voilà qu’un empereur, sans couronne et sans guide,
Un empereur, sans nom, au front chauve et glacé,
Ayant perdu la trace où son char a passé,
Seul dans son grand désert, errait dans la nuit sombre,
Et cherchait son empire et ne trouvait qu’une ombre.
Son cheval sans hennir, et sans ronger le mors,
Comme font les coursiers que chevauchent les morts,
Haletant a passé mainte haute muraille,
Mainte vallée amère et maint champ de bataille ;
Et les peuples disaient : quel est ce cavalier
Qui passe comme une ombre en creusant son sentier ?
N’était-ce pas celui qui d’un signe de tête
Ébranlait notre toit, comme fait la tempête ?