Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/162

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qui perce là-bas le nuage ? Non, c’est sa cime décharnée. Est-ce une louve au poil fauve qui lèche là-bas ses petits ? Non, c’est son penchant de bruyères. Des feuilles tombées d’un chêne invisible clapotent dans les sentiers. Au-dessus du sommet, un épervier, aux ailes de cent coudées, trace son cercle dans le ciel. Le silence est profond, plus profonde est l’ombre dans le ravin. Volontiers, je bâtirais ici ma hutte sur ce roc pour toujours, si j’y trouvais de l’eau.



La Vallée De Josaphat.

Voyageur, beau voyageur, poursuivez votre route.

Je n’ai ni puits ni citerne. Ceux qui habitent mon penchant n’ont jamais soif.



Ahasvérus.

Où as-tu planté tes dattiers ?



La Vallée de Josaphat.

Je n’ai ni dattes ni dattiers. Ceux qui demeurent à ma cime n’ont jamais faim.



Ahasvérus.

Cherche dans ta broussaille si tu n’as pas un simple pour guérir une blessure au cœur, comme du fer d’une pique.



La Vallée de Josaphat.

Mes simples, dans ma broussaille, guérissent toutes les plaies, mais non pas les plaies au cœur, quand l’épine y est restée.

Comment t’appelle-t-on dans le pays alentour ?



La Vallée de Josaphat.

Je suis la vallée où mène chaque sentier. Je suis la mer vide, je suis le chemin sans issue, je suis l’océan sans flots, je suis le désert sans caravanes, je suis l’orient sans soleil. Toute chose se hâte pour s’asseoir sur mon