d’abord la dogmatique, la dialectique, la diplomatique et l’hypercritique.
Ahasvérus.
Laissez là, de grâce, ces mots vides. Pour me
rendre le repos, c’est une religion nouvelle qu’il
me faudrait, où personne n’aurait encore puisé.
C’est elle que je cherche. C’est là seulement
que je pourrai abreuver la soif infinie qui me
dévore.
Mob.
La nouveauté me plairait autant qu’à vous. Souvent
il arrive, en effet, qu’un dieu est mort et
enterré dans le ciel, et que nous l’adorons
encore sur la terre. Toute la difficulté est de
connaître au juste l’époque du décès, pour ne pas
perdre son temps devant un squelette qui pendille
à la voûte de l’éternité. Mais, après tout,
dans le doute, un homme comme il faut peut
toujours, au besoin, être son dieu à lui-même
pendant une quinzaine d’années, en attendant
que le ciel se déclare.
Ahasvérus.
Jusqu’à présent, hélas ! Je n’ai que trop erré de
lieux en lieux, d’espérance en espérance, de
cultes en cultes. éplorée, mon âme a frappé
à tous les points de l’univers, et n’a trouvé
nulle part d’écho. J’aurais voulu souvent,
pendant mes insomnies, embrasser dans ma pensée
les cieux roulants, m’engloutir dans le tourbillon
des mondes. Ah ! Que souvent, en voyage, au
bruit d’une eau qui tombait des Alpes, j’ai
attendu follement jusqu’au soir que mon âme
s’évaporât aussi avec l’onde ! Que de fois, en
nageant dans un golfe écarté, j’ai pressé avec
passion la vague sur ma poitrine ! à mon cou,
le flot pendait échevelé, l’écume baisait mes
lèvres. Autour de moi jaillissaient des
étincelles embaumées. Au loin, rives, villes,
villages, ombres de citronniers, vallées,
montagnes, tout