y a des
grandeurs, voyez-vous, de rois et de
royaumes qu’il faut disséquer avec dignité.
Mes ailes fidèles m’ont emportée... bien... les
villes tremblent sous mon vol... pauvres petites,
mon ombre, qui passe, est plus lourde, n’est-ce
pas, que vos murailles. Encore un battement
d’aile, et je serai sur la nue. D’ici, ma foi,
le coup d’oeil est divin. L’océan est comme une
coquille qui blanchit, la terre est comme un
jeu d’osselets. Mais c’est plus haut qu’est le
véritable point de vue : le ciel noir, l’horreur
du vide et une goutte d’eau qui s’évapore.
A cette distance, heureux qui entend le silence des
astres. De trop près, l’harmonie m’agace les
nerfs. Plus heureux qui écoute la lyre de
l’infini, quand elle a cassé ses trois cordes.
La pensée s’élève au secret des cieux. Tout
est compté par poids et mesure. Pourtant, dans
chaque lieu, le rien surabonde. Le zéro est le
nombre sacré. C’est sur lui que tout repose. Sa
forme est mystérieuse. Il n’a ni commencement
ni fin. Il étreint sans saisir. Sans être, il
paraît ; et la sphère des mondes est un grand
zéro qui se trace vide dans le vide espace.
Du néant faire quelque chose, c’est une
difficulté ; mais de toutes choses faire un
néant, ci-gît le véritable problème. D’un
souvenir tirer une ombre, d’une ombre une
pensée, d’une pensée un rêve, d’un rêve moins
qu’un rien, dans un rien qui s’ignore, ci-gît
la vie. Seulement d’y songer, la tête se fend.
à cette profondeur, les idées se brouillent.
Vos raisonnements s’en vont en cendre, et
le cœur aussi me manquerait, si, heureusement,
une fausse relique n’en remplissait fort bien
la place.
Rachel, Berthe,