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Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/390

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Puisque tu as fini la tâche que je t’avais donnée, je te rendrai ta maison en Orient.

Y veux-tu retourner ?



Ahasvérus.

Oh ! Non, seigneur.



Le Christ.

Que voudrais-tu ?



Ahasvérus.

Ni ici, ni là, je ne peux plus m’asseoir. Je demande la vie, non pas le repos. Au lieu des degrés de ma maison du Calvaire, je voudrais sans m’arrêter monter jusqu’à vous les degrés de l’univers. Sans prendre haleine, je voudrais blanchir mes souliers de la poussière des étoiles, monter, monter toujours, de mondes en mondes, de cieux en cieux, sans jamais redescendre, pour voir la source d’où vous faites jaillir les siècles et les années. Je voudrais, comme je frappais au seuil des hôtelleries d’Espagne et d’Allemagne, aller frapper toujours à des étoiles inconnues, à une vie nouvelle, à des seuils entr’ouverts au bout de l’infini et à des cieux meilleurs.



Le Christ.

N’es-tu pas fatigué de ton premier voyage ?



Ahasvérus.

Votre main, en se levant sur moi, a déjà séché ma sueur. Bénissez-moi, et je partirai ce soir vers ces mondes futurs que vous habitez déjà.



Le Christ.

Mais qui voudrait te suivre ?



Voix dans L’Univers.

Non pas nous. Si vous voulez, nous retournerons sur nos pas ; mais nous ne pouvons pas monter plus haut. Nos flots, nos cavales sauvages, nos tempêtes sont lassés.



Rachel.