Page:Quinet - Œuvres complètes, Tome VIII, 1858.djvu/403

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Adieu, mondes, étoiles, rosée du matin et du soir qui m’avez salué par mon nom, quand j’étais petit enfant. Adieu, lacs de montagnes dont je remplissais la coupe, nuées que je portais sur mes épaules, comme une palme bénite. Mer, oh ! Qui prendra soin demain de tous tes flots quand tu seras endormie ? Oiseau des bois, qui fera à ton petit son habit de duvet, pendant que tu iras par les champs ? Désert d’Arabie, qui te donnera à boire sur le bord de ta citerne, quand tu auras soif ? Pauvre étoile voyageuse, qui te réchauffera dans ses mains, quand tu seras égarée dans la nuit froide ? Flot de soleils, vague infinie, qui te dira demain, à toute heure, dans toute langue, en tout lieu : je t’aime, quand tu soupireras si tristement en léchant tes rives ?


Mondes, étoiles, rosée du matin et du soir, est-il donc vrai ? Dans la nuit, dans le jour, au loin, à l’alentour, n’y a-t-il donc plus personne ?



L’Echo.

Personne.



Le Christ.

Plus noir que le fiel de Pilate, le doute remplit ma coupe et mouille mes lèvres. Si je ne mettais pas le doigt dans ma plaie, ma bouche ne saurait plus dire mon nom, et le Christ ne croirait plus au Christ.

Qui ai-je été ? Qui suis-je ? Qui serai-je demain ? Verbe sans vie ? Ou vie sans verbe ? Monde sans Dieu ? Ou Dieu sans monde ? Même néant.

Mon père, ma mère, mon église avec l’