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AVE

vesper serus trahat. Tu ne sais pas les événements que peut amener le soir.

M. Dussault rapporte, dans un article du Journal des Débats, que la chevalière d’Éon avait coutume de dire : On ne sait pas ce qu’il y a de caché dans la matrice de la Providence. Si l’axiome n’est pas nouveau, l’expression est assurément neuve.

Il ne faut pas se fier sur l’avenir.

Il ne faut pas que les espérances que l’on fonde sur l’avenir fassent négliger les soins du présent. Fontenelle disait : « Nous tenons le présent dans nos mains ; mais l’avenir est une espèce de charlatan qui, en nous éblouissant les yeux, nous l’escamote. Pourquoi souffrir que des espérances vaines ou douteuses nous enlèvent des jouissances certaines ! »

Les Basques ont ce proverbe : Gueroa alderdi ; l’avenir est perclus de la moitié de ses membres, pour signifier, je crois, que l’avenir qu’on a en vue n’arrive presque jamais, ou que, s’il arrive, il n’est ni tel qu’on le désire, ni tel qu’on le craint. « Il est des millions de millions d’avenirs possibles, dit M. de Chateaubriand. De tous ces avenirs un seul sera, et peut-être le moins prévu. Si le passé n’est rien, qu’est-ce que l’avenir, sinon une ombre au bord du Léthé qui n’apparaîtra peut-être jamais dans ce monde ? Nous vivons entre un néant et une chimère. »

Quid brevi fortes jaculamur ævo
Multa ?

(Horace, od. 16, lib. ii.)

Pourquoi, si loin de nous, lancer dans l’avenir
L’espoir d’une existence aussi prompte à finir ?

Bien fou qui s’inquiète de l’avenir.

Ce proverbe ne doit pas s’entendre à la lettre, car il signifierait qu’il est sage de négliger les soins de l’avenir, de laisser au hasard la disposition de notre vie, et de ne pas pourvoir à l’intervalle qu’il y a entre nous et la mort ; ce qui offrirait une maxime déraisonnable, ce qui assimilerait la prudence à la folie. Il signifie simplement qu’il ne faut point se livrer à des prévoyances inquiètes de l’avenir, parce qu’elles détruisent la sécurité du présent et ne laissent aucune paix à l’homme.