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Page:Réflexions sur la révolution de France.pdf/328

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de tous les vices possibles ? Dans ses excès possibles, je la crois un très-grand mal ; cependant la superstition étant dans le ressort de la morale, elle est susceptible de variations dans ses degrés, et de modifications dans ses formes. La superstition est la religion des esprits faibles ; et il faut bien souffrir qu’ils en aient un mélange, soit dans des choses peu importantes, soit dans leur enthousiasme, soit autrement ; sans cela, vous priveriez les esprits faibles d’une ressource qui est reconnue nécessaire même pour les esprits les plus forts. La base de toute véritable religion consiste assurément dans l’obéissance à la volonté du souverain de l’univers, dans notre confiance en ses promesses, et dans l’imitation de ses perfections. Le reste est notre ouvrage : il peut préjudicier à cette grande fin, il peut la seconder. Les hommes sages, ceux qui le sont en effet, ne sont pas admirateurs (pas au moins des munera terrœ[1] ; ils ne sont pas attachés à ces choses avec violence, ils ne les détestent pas avec violence ; la sagesse n’est pas le censeur le plus sévère de la folie. Il n’y a que des folies rivales qui se déclarent une guerre inexorable, et qui fassent un usage cruel des avantages qu’elles remportent, dès qu’elles peuvent décider le vulgaire inconsidéré à se ranger de l’un ou de l’autre

  1. Allusion à l’Épitre VI d’Horace, Liv. I.

    Nil admirari.......

    De quel œil, dites-moi, devons-nous regarder
    Les plus riches trésors de la terre et de l’onde ?