Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/188

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froy ni une Mme du Deffant, dispose cependant d’un salon influent. Quoiqu’elle n’ait pas de grandes aptitudes à ce rôle, elle n’en est pas moins la femme de Grinderel, et la puissance de Grinderel est un centre d’attraction suffisant pour que les réceptions de son épouse soient fort courues. Il est donc bon d’avoir un pied sur ce terrain, et je l’aurai. Ce sera un peu dur au début, car il faudra commencer par subir les conseils de Mme Grinderel, mais je m’y ferai et je compte bien profiter des avantages mondains de la maison.

Ceux que je compte tirer de Mme de Glockenstein sont également appréciables. Mme de Glockenstein s’était liée avec ma mère durant un séjour à Nice. M. de Glockenstein est Allemand et Mme de Glockenstein est Belge. À eux deux, ils sont fort riches et on peut lui trouver encore une sorte de beauté. C’est une femme d’une cinquantaine d’années, avec une figure régulière et agréable, l’air gai et paisible. Elle a cette particularité que la réflexion lui fait faire une grimace assez comique. À ces moments, elle pince les lèvres d’une certaine façon. Ajoutez-lui un maquillage, hardi et naïf à la fois, et des cheveux teints en or. Le soir, elle pose une large mouche à la naissance de sa gorge, qu’elle a abondante. Mme de Glockenstein occupe un bel appartement au rond-point des Champs-Elysées. Elle l’a choisi afin de pouvoir, de sa fenêtre, assister à toutes les entrées de souverains.

Mme de Glockenstein tient, en effet, un salon politique, un vrai et non une de ces parlottes où l’on discute à vide des événements qui sont dans les gazettes et où l’on règle à Cracovie les destinées de l’Europe. Le salon de Mme de Glockenstein n’a rien de terne, ni d’ennuyeux. Il est rempli de jolies femmes et l’on y cause littérature, théâtre, galanterie. Seulement, parfois,