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Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/314

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Avant que j’eusse pu lui offrir de l’accompagner, Laure avait gagné l’escalier et dégringolait les marches en riant. Je me penchai sur la rampe. Elle se retourna, m’adressa un signe d’adieu. Un instant après, elle avait disparu. Sur la passerelle, Antoine verdissait et pâlissait. Le commandant s’est approché de lui :

— Alors, monsieur le Baron, c’est bien décidé…

Antoine acquiesça d’un signe. Le commandant donna un ordre au timonnier. La roue tourna sous sa main. L’Amphisbène fuyait au vent.

J’ai ramené Antoine dans sa cabine et je suis allé m’étendre sur mon lit.

La mer est tout à fait calme maintenant. La houle est devenue presque insensible. La bourrasque a donc duré environ trente-six heures. Aujourd’hui, la matinée a été pure et claire. On a ouvert les obturateurs des hublots. Parfois encore, une vague rend glauques leurs ronds de cristal lumineux et y dessine en écume comme une fuyante chevelure de Sirène. On a remis de l’ordre dans ma cabine. Les chaises sont redevenues de braves chaises tranquilles. Mes chaussettes et mes mouchoirs ont réintégré le tiroir, lequel est rentré dans la commode. Après le tohu-bohu que nous avons subi, on éprouve une agréable impression de paix et de repos. Quand j’eus terminé ma toilette, je suis monté sur le pont. Sur notre gauche à l’extrémité de l’horizon se dessine une ligne bleuâtre. C’est la côte d’Afrique que nous commençons à distinguer. Tel est le résultat du changement de