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LE VASE


Mon marteau lourd sonnait dans l’air léger,
Je voyais la rivière et le verger,
La prairie et jusques au bois
Sous le ciel plus bleu d’heure en heure,
Puis rose et mauve au crépuscule ;
Alors je me levais tout droit
Et m’étirais heureux de la tâche des heures,
Gourd de m’être accroupi de l’aube au crépuscule
Devant le bloc de marbre où je taillais les pans
Du vase fruste encor que mon marteau pesant,
Rythmant le matin clair et la bonne journée,
Heurtait, joyeux d’être sonore en l’air léger !

Le vase naissait dans la pierre façonnée,
Svelte et pur il avait grandi
Informe encor en sa sveltesse,
Et j’attendis,
Les mains oisives et inquiètes,
Pendant des jours, tournant la tête