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LA CORBEILLE DES HEURES


Au moindre vent.
Je t’ai connue, assise au porche sur le seuil
De la Vie et du Songe et de l’An,
Jadis, toi qui, du seuil,
Regardais venir l’aube et tressais des couronnes.


Je t’ai revue,
Chère Ombre nue.
Avec tes cheveux rouilles d’or roux,
Graves de tout le poids de leur automne ;
Le vieux vent d’est pleure dans les haies,
Lourd d’avoir rôdé, l’aile basse ;
Le pampre se desserre au tronc qu’il désenlace
Et la terre s’éboule au talus qui l’étaie ;
La joie est brève et l’heure passe,
Et chacun marche vers un autre qui recule,
Et la fleur de l’aurore est fruit au crépuscule
Et le fruit d’or du soir est cendre dans la nuit.

Je t’ai revue,
Tu étais nue,
Comme à l’aube où je vins par la route des blés,
Moi qui reviens vers toi par le chemin des chaumes
Avec le soir qui tremble et le pas de l’automne