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LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS


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Au soleil couchant, la même grève qu’à l’aurore. Sur le sable il est étendu mort, auprès de lui elle se tient vêtue d’une sorte de longue robe glauque dont la traîne se contourne caudale et écaillée.


ELLE


Ô pauvre frère aux yeux de songe et de science,
Toi qui veillais dans l’ombre et ne souriais pas
Ô triste frère aux yeux de science et de songe,
Toi qui veillais dans l’ombre,
Du soir à l’aube lente,
Es-tu si las,
Si las, mon frère, que tu n’aies voulu vivre.
Si triste, mon frère, que tu gises
Enfin dormant sur cette grève, toi qui dors
Tandis que le soleil tiédit mes cheveux d’or
Qui se déroulent et ruissellent et qui vivent
En leurs langueurs d’algues et d’or,
Ô toi qui dors !

Les fleurs pourtant embaumaient les matins clairs,
Il y avait des roses dans la forêt
Et des iris près de la fontaine et près
Des ruisseaux, et, le long de la Mer,
Sur les grèves, poussaient dans le sable rose
Les chardons bleus et les herbes mauves.