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les médailles d’argile

Quand tu croyais saisir quelque divine proie
Persévérant chasseur sans flèches ni filets…
Je t’ai suivi dans la forêt où tu voulais
Surprendre le Sylvain ou saisir la Dryade
Alors qu’à la naissante aurore elle s’évade
De l’écorce rugueuse où s’écorche ta main.
En vain ta hache abat l’arbre ; il est vide. En vain
Tu t’es courbé longtemps au-dessus des fontaines
Pour entrevoir dans l’eau fugitivement vaine
La Nymphe qui l’habite et qui ne montre plus
Au ruisseau transparent son corps fluide et nu
Qui selon la courbe où l’étreinte de la rive
S’étirait en fuyant avec l’onde furtive.
Ô berger, c’est en vain que parmi les troupeaux,
Nourri de leur laitage et vêtu de leurs peaux,
Assis la flûte aux doigts près des ruches à cire,
Sous la lune, l’été, tu guettas le Satyre
Dont le sabot piétine et qui marche en dansant.
Vaine attente ! À genoux, je t’ai surpris souvent
Au crépuscule près de la source sacrée
Sur le sable cherchant la trace vénérée
De Pégase. La Mer à tes regards pieux
N’a pas fait de ses flots jaillir ses glauques Dieux.
Aucun, qu’il soit des prés, des antres ou des grèves,
N’a montré son visage au désir de tes rêves ;
Pas même ceux, jadis, qui, partout familiers,