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les médailles d’argile

LA DAME


Nul portrait n’est venu jusqu’à nous d’âge en âge,
Sur la cire, l’émail, la toile ou le métal,
Vivant au cadre d’or, d’ébène ou de santal,
Transmettre à ses neveux son ombre ou son image.

Fut-elle blonde, gaie ou rousse, belle ou sage ?
Fille d’un siècle dur où l’amour fut brutal,
S’est-elle regardée, en pleurant, au cristal,
Une perte à la gorge et l’œillet au corsage ?

Rien d’elle que son nom accolé sur le marbre
À celui d’un époux et, rameaux du vieil arbre
Héraldique et fécond où se greffa sa grâce,

Les sept fils que son sein orgueilleux a nourris
Et qui, fruit de son flanc et fleur de notre race,
Ont seuls connu les yeux qui leur avaient souri.