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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/273

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n’est ni beau ni relevé quand il prend plaisir où vous savez. La posture de l’amour n’est point avantageuse, et la nature exige de nous, quand nous voulons satisfaire l’instinct qu’elle y a mis, des mouvements qui, s’ils donnent à notre corps un agrément intérieur, n’ont point de grâce apparente et font, du plus galant cavalier et de la plus parfaite monture, un groupe monstrueux que la fable pourrait mettre à côté de ses centaures.

» Si je n’étais pas orgueilleux, je n’étais pas non plus avare. Le goût des femmes habitue à dépenser facilement son argent et l’on n’hésite pas à payer ce qu’il faut pour être bien reçu d’elles. Je leur devais aussi de n’être pas gourmand. Les exercices de l’amour me donnaient faim et j’aimais mieux manger pour réparer mes forces que pour savourer la finesse des morceaux. Ainsi, monsieur, il semblait que mon péché ordinaire m’eût dispensé de la plupart des autres. Ils avaient perdu leur pouvoir dans le sien, et je pouvais penser, vous en conviendrez, que, si jamais je parvenais à détruire en moi l’entraînement irrésistible qui me portait à l’œuvre de chair, je deviendrais du coup un chrétien pas plus mauvais qu’un autre et