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LA DOUBLE MAÎTRESSE

M. de Portebize écoutait avec stupéfaction les discours de Mlle  Fanchon. Depuis un instant, une forte odeur de roussi se sentait dans l’air. Fanchon courut et revint vite. Elle semblait fâchée, et une moue de dépit abaissait les coins duvetés de sa bouche.

— « Voilà le dîner de M. l’abbé brûlé plus qu’à moitié. Ah ! mon Dieu ! Et M. l’abbé qui ne rentre toujours point ; il y a tant de carrosses par les rues ! Pourvu qu’il ne lui soit pas arrivé malheur ! Sans compter qu’il rapporte souvent des livres plus gros que lui !

Elle se lamentait et pleurait presque et tenait des deux mains son tablier dont elle s’essuyait délicatement le coin de l’œil quand on gratta à la porte.

La fillette que M. de Portebize avait vue, en entrant, au bas de l’escalier, montrait sa figure barbouillée et rouge et présentait une lettre au bout de ses doigts sales.

— « Donne, Nanette ; qui t’a remis cela ?

— Un gros laquais.

— Il y a longtemps ?

— Tout de suite.

— Tu mens. Vous permettez que je lise, Monsieur ?

« Fanchonnette, ne m’attends point. Je souperai chez Mlle  Damberville. Je te rapporterai des croquignolles et de l’angélique. Tu auras ceci assez tôt pour pouvoir aller chez M. Darledel étudier ton pas. »

— Tu vois bien que tu as menti, Nanette. Pourquoi n’es-tu pas montée de suite ? Pourquoi as-tu sali le billet ?