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LA DOUBLE MAÎTRESSE

confusion de ses ennemis. Il fallait qu’il connût à fond l’intrigue ecclésiastique pour mériter qu’on le jugeât propre à affronter les affaires délicates de la politique romaine. Du choix qu’on venait de faire de lui, il ressentait toute l’importance et tout le prix. Aussi ne doutait-il pas de ses succès ultramontains non plus que de la réussite de l’entreprise plus modeste qui l’amenait aujourd’hui à Pont-aux-Belles.

Après les premiers compliments, la conversation prit un tour familier, et M. de la Grangère demanda à visiter les jardins. L’entretien s’y continua. L’évêque marchait auprès de Mme  de Galandot qui, pour la première fois, regretta l’état d’abandon et de négligence où se trouvaient, faute de taille et de râtissage, les charmilles et les allées.

On était arrivé à un rond-point. L’évêque, un peu essoufflé, s’arrêta, et, regardant autour de lui, il leva ces mains fluettes :

— « Certes, Madame, quoi que vous disiez de ce qu’il est et pensiez de ce qu’il fut, ce lieu n’en reste pas moins fort beau, et je comprends les regrets de notre abbé d’avoir à en quitter bientôt les tranquilles ombrages. »

Et là-dessus, il vint à laisser entendre que de puissants intérêts voulaient qu’il emmenât à Rome M. Hubertet. Il insista sur les hésitations de l’abbé, son attachement à son élève.

— « Car, Madame, notre abbé a mené modestement et sûrement une grande tâche. Il a fait, avec votre secours, et sous vos yeux, de votre fils, un gentilhomme pieux et bon. Je ne doute pas que