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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.


Ô ! souvenir cruel à ma patrie,
Tu ceins mon front comme un pesant bandeau !
Hélas ! Waller, aussitôt l’on t’oublie,
En vain mes yeux demandaient son tombeau.

Où sont ces jours que l’étendard de gloire,
Couvrant son front, flottait aux premiers rangs.
Déjà partout on sonnait la victoire ;
Ô liberté ! venge un de tes enfants.
Morne et pensif le peuple le regarde,
Et dit tout bas, « de mourir qu’il est beau,
Lorsque l’on tombe aux rangs de l’avant-garde. »
En vain mes yeux demandaient son tombeau.

Waller n’est plus ; mais sa noble éloquence
Réchauffe encore ses anciens compagnons :
Fertile sol où mûrit la semence,
Oui, ses écrits auront des rejetons.
Le feu sacré de l’antique Hibernie
Dans notre sein coule comme un ruisseau.
Heureux les bords qui furent sa patrie !
En vain mes yeux demandaient son tombeau.

Las de porter les fers de l’esclavage,
Des bords chéris en pleurs il s’exila ;
La liberté le vit sur notre plage,
De son autel l’ombrage le voila.
Et citoyen d’une terre étrangère,
On le voyait mourir sous son drapeau :
Il fut fidèle en nos jours de misère.
En vain mes yeux demandaient son tombeau.

Ah ! s’il pouvait de l’empire des ombres
Voir ici-bas ses anciens compagnons ;
Ses pleurs feraient gémir les rives sombres,
Il ne verrait que des désertions.
Le sang aussi aurait scellé leur crime ;
Dans leur patrie ils plongeaient le couteau !
Et de leurs mains ils creusaient son abîme.
En vain mes yeux demandaient son tombeau.

Mais quel écho de la cité lointaine,
Vient de frapper son rempart crénelé :
Vite un denier à la main qui promène,
Chacun criait, pour le pauvre exilé.