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LE RÉPERTOIRE NATIONAL.


Et par toi je relis ce testament divin,
Qui peint de l’univers le principe et la fin.
Mais de l’opérateur voyons la main légère ;
C’est là que de son art elle fait un mystère.
L’artiste généreux détermine mon sort,
Fait palpiter mon cœur et m’arrache à la mort :
Mes membres mutilés doivent à son adresse,
Leur nouvelle vigueur, leur première souplesse.
Il est une autre main qui chasse le trépas.
Une main… mais ô honte ! on ne l’honore pas,
Oui, noble Laboureur, c’est ta main sèche et dure
Qui livre à nos cités les dons de la nature ;
Dans des terrains ingrats elle conduit le soc,
Abat le chêne altier, pulvérise le roc ;
Et quand par ces travaux tu prolonges ma vie,
La tienne avant le temps, t’est trop souvent ravie.
Ah ! sans baiser la main d’un maître impérieux,
Je baiserai la tienne et rendrai grâce aux cieux.

J. D. Mermet.



1816.

L’ART INDÉFINISSABLE.


Comment donc définir le grand art de la guerre ?
Il est partout connu ; partout il est mystère.
Dirai-je que cet art, honorable, odieux,
Sert, en les révoltant, et la terre et les cieux ?
On le loue, on le blâme, on le cherche, on l’évite :
Enfin c’est un fléau qu’on craint et qu’on mérite.
Les guerriers sont, dit-on, aussi sages que foux,
Modestes comme fiers, et moins cruels que doux :
Ce sont des vérités qui passent pour des fables,
L’art et les artisans sont indéfinissables.
Tel qui brave la mort est un homme d’honneur ;
Tel qui la donne montre et de l’âme et du cœur :
C’est la loi qui l’ordonne, et la loi la plus dure
Fait taire, en combattant, la loi de la nature.
On estime sa vie, on la livre au plus fort ;
On admire un rival, on lui donne la mort.