Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/142

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je n’y-avais-pourvu : je te dirai donc que j’ai fait-faire un berceau de coudriers ét de jeunes charmes, avec des branches-de-vignes garnies de leurs fruits que j’ai-coupées ; ét ce berceau eſt à la corne du bois de la Provenchère, tout-juſtement à l’endrait juſqu’auquel je te reconduisis, quand tu fus demeurer à la Ville ; car du depuis, cet endrait-là m’a-toujours-causé comme un attendriſſement qui me-fait peine ét plaisir tout-à-la-fois ; ét j’y-ai-quasi-pleuré à-ce-matin, en-y-laiſſant Urſule. Demain, avant ſoleil-levé, j’y-ferai porter une jolie petite colation ; ét Ceux qui l’auront-portée ſ’en-reviéndront par un autre chemin, dès que tu ſeras-arrivé ; ét toi, tu te-tiéndras aſſis à-l’entrée du berceau ; ét lorſque notre Père, notre Mère, ét m.r Parangon approcheront, tu joueras ſur ta flûte cet air que notre Mère aime tant. Ils ſeront-bién-ſurpris ! je ferai l’étonné comme les Autres ; ét quand ils verront tout-ça, ils auront bién de la ſatiſfaction, ét ils feront dans ces pauvres campagnes un agreable repas. Mon chèr Frère, je n’ai qu’un regret ; c’eſt de ne pouvoir être temoin de ton mariage, Il faut que je gouverne la maison en—l’abſence de notre Père, que je veille au vin-nouveau, ét que j’avance la ſemaille de nos bléds ; nous ſommes dans le temps de l’année le plus à menager, comme tu ſais bién ; puiſque ſi on laiſſe échapper un beau jour, on n’eſt pas ſûr de le ratrapper. Mais en-ma place, j’ai-obtenu de Fanchon qu’elle ſerait