Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/163

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sition me-fermait le paſſage. Enfin, dans un mouvement qu’il fit, pour venir plus-prés de moi, je reüſſis à m échapper, ét je reſtai dans le ſalon, où tout le monde paſſe, juſqu’au retour de Madame. Il était furieus contre moi ; car je ne voulus pas executer quelques ordres qu’il me-donna[1], ét qui m’exposaient à retomber entre ſes mains. Il ſ’en-plaignit à ſa Famme, lorſqu’elle fut de-retour : ma Maîtreſſe feignit beaucoup d’étonnement, me-gronda unpeu, ét le pria de me pardonner. Mais dès que nous fumes ſeules, elle me-dit : — Je vois tout, ma Fille ; tu es-faite pour moi : ne m’apprens rién de m.r Parangon ; mais parle-moi de toi-même : Qui ſont tes Parens -? Je rougis à cette queſtion, — Crains-tu (me-dit-elle) de me confier tes ſecrets ? — Moi, madame ! (lui repondis-je ) ah ! vous alez tout ſavoir-. Effectivement, je lui avouai tout ce que je viéns de vous raconter à vous-même. Elle blâma la hardieſſe ét l’inconſideration de ma demarche, d’avoir, à mon âge, quitté mes Parens, pour venir ſervir ; mais ce fut avec tant de reserve, que je ſentis bién plûs ſa bonté que mes torts, Je lui montrai une Lettre de m.r Loiseau, qui devait arriver dans quelques jours, de l’aveu de ſes Parens, avec toutes les precaucions neceſſaires pour ne donner aucun ſoupçon de notre intelligence. — C’eſt dorenavant, ma

  1. Il y-a dans l’Original : car je ne voulus pas aler arroser à la cave de la chicorée blanche.