Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou avant d’avoir-payé ſa maîtrise les Grands-garſons portent chaqu’un leur houſſine, avec laquelle ils le roſſeraient d’importance. Quant aux Maîtresgarſons, ils ont toute liberté ; ils vont à toutes les portes, cherchant les Filles, juſqu’à ce qu’ils aient-trouvé une Maitreſſe ; Et quant ils en-ont-trouvé Une, ils le declarent au Maîtregarſon, qui en-donne avis aux Autres, en-ces propres termes : « Mes Amis, Jaquot tel, ou Giles tel, va à Margot, Jeanne ou Reine telle ; ainſi, au-cas où Perſone n’aura-jeté ſes vues ſur elle, il ne faut pas le troubler, mais le laiſſer tranquil, juſqu’à conclusion de mariage en-face d’église », Les autres Garſons repondent Un après l’Autre ; ét ſ’il y-a rivalité, Celui qui eſt rival, le declare. Le Maîtregarſon leur dit alors : « Mes Amis, jalousie ne vaut rién ; une Fille eſt une Fille, ét il y-a plus d’une Fille dans le Village, voire-même dans les autres Villages ; par-ainſi, je vous conſeille de vous accorder, ou de tirer à la courte-paille, à Quî l’aura » ? Et ordinairement les Garſons acceptent de tirer, ét tout eſt-dit : mais ſ’ils perſiſtent chaqu’un, alors le Maîtregarſon ſe-borne à leur defendre les voies-de-fait, ſous peine, pour l’Aggreſſeur, d’avoir tous les Garſons ſur le corps, ét d’être-roſſé. Et le Maîtregarſon leur dit : « Courez-en donc l’avanture, ét que les Parens en-decident ; mais quand ils auront-decidé, ainſi que la Fille, j’entens que le Refusé ſe-retire ». Et ſi la Fille voulait l’Un, ét les Parens l’Autre,