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étaient particulièrement en proie à la misère, à la famine, à toutes les calamités ; une partie de la ville bombardée et brûlée ; toutes les habitations de la campagne brûlées, pillées ; plus de pain, plus de bestiaux ; rien à manger ; plus d’abris ; les familles décimées par la guerre et par les maladies ; partout des femmes et des enfants implorant la charité publique. L’évêque de Québec lui-même adressa, le 9 novembre, une lettre touchante au ministre de la marine, pour lui demander « que l’on fît quelque charité aux pauvres Canadiens sans abris et sans ressources[1]. » Cette lettre n’eut d’ailleurs aucun effet.


On crut d’abord, en Europe, que la prise de Québec allait terminer la guerre d’Amérique. « Personne n’imaginait, dit Raynal, qu’une poignée de Français qui manquaient de tout, à qui la fortune même semblait interdire jusqu’à l’espérance, osassent songer à retarder une destinée inévitable. » Toute communication avec la France étant interrompue, tout espoir de secours était en même temps fermé. Toutefois, ces braves Canadiens, aussi Français de cœur que s’ils eussent toujours vécu sur le sol de la vieille France, — peut-être plus, car l’éloignement développe d’ordinaire l’amour de la patrie, — ne s’abandonnèrent point encore. Le chevalier de Lévis, rassemblant les débris de notre armée aux milices canadiennes qui partout et spontanément se levèrent en masse, décida de tenir la campagne jusqu’au printemps suivant, espérant qu’à cette époque la France lui enverrait les moyens de reconquérir le terrain perdu. M de Vaudreuil se for-

  1. Dussieux, p. 226.