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Page:Raîche - Les dépaysés, c1929.djvu/85

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les dépaysés

moitié de la population et comptent une centaine d’églises.

À l’hôtel, j’entends sans le vouloir une dame discourir sur le dévergondage des jeunes filles modernes. Je soupçonne que c’est une moins jeune fille dont les succès ont dû être rares et qui en vieillissant tourne à l’aigreur. Elle mêle ses remarques d’exclamations : « De mon temps, on faisait comme cela, de mon temps on ne faisait pas comme cela, » et je songe à la nature humaine qui a dû beaucoup changer depuis cet heureux temps. Mais pourquoi presque tous ceux qui ont atteint un certain âge trouvent-ils la génération actuelle moins vertueuse que la précédente ? C’est sans doute qu’ils oublient.

Le lendemain matin, nous sommes éveillés avant le jour par un cyclone de touristes qui parlent avec volubilité, font claquer les portes, s’engouffrent dans les corridors en un ouragan. Des voix perçantes de femmes dominent le tumulte. Et je pense aux mots de Paul Claudel :

Faites que je sois comme un semeur de silence.

Nous nous levons déjà aigris contre la ville toute entière, mais il suffit de promener les regards autour de nous pour entrer dans des sentiments plus sereins et plus amicaux.

Nous visitons quelques églises. En général nous pouvons dire que les églises des États-Unis sont assez belles. Quelques-unes cependant sont un peu déparées par un certain faux surfait. Les plus charmantes sont les petites églises de campagne, si humbles, si blanches, qui sont là comme des prières. L’idée d’utilité, d’adaptabilité aux circonstances semble avoir présidé à la construction des églises du pays,