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Page:Raban - Justine, ou Les malheurs de la vertu, 1836.djvu/675

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JUSTINE.

plus d’armée et de guerre. Elle allait à Paris, elle qui n’était jamais sortie du vieux manoir de son père que pour aller passer quelques années au couvent ; elle allait à Paris, dont elle avait entendu raconter tant de merveilles, où il y avait de si belles parures, de si brillans équipages ; elle allait à Paris, et elle était la maîtresse du roi !… Il n’en faut pas tant pour tourner une cervelle de seize ans. Il est vrai qu’elle ne pouvait manquer d’avoir à rabattre quelque chose de tous les châteaux en Espagne qu’elle faisait ; car la capitale de France alors ne ressemblait guère à ce Paris qu’on lui avait vanté : presque tous les riches hôtels étaient déserts ; il n’y avait plus de superbes équipages ; les élégans du jour portaient des carmagnoles et des bonnets à queue de renard ; les femmes se coiffaient à la Marat, c’est-à-dire que les magnifiques dentelles, les jolis chapeaux étaient remplacés par des mouchoirs à tabac. Mais enfin il y avait bien encore, dans cette