Page:Rabaut - Le vieux Cévenol, 1886.djvu/117

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
116
le vieux cévenol.

tôt une vingtaine de paysans armés vinrent fondre sur eux, animés par deux grands motifs : la religion et l’espoir du butin. Les Ordonnances du roi[1] donnent le tiers des effets des fugitifs à ceux qui pourront les arrêter ; et ces lois, pleines de sagesse et de douceur, arment ainsi continuellement une partie des Français contre l’autre. Un autre tiers appartient, par les mêmes ordonnances, aux délateurs, genre d’hommes respectables qu’il est bon d’entretenir dans un État bien gouverné. Que si quelqu’un s’avisait d’avoir la fausse charité de dérober ces fugitifs aux poursuites ou de les favoriser le moins du monde dans leur évasion, une autre loi[2], non moins sage, condamne ce malhonnête homme aux galères. Mais, le législateur s’étant aperçu de sa méprise, et que cette peine était trop douce, la commua en peine de mort le douzième jour d’octobre de l’an de grâce 1687. Ces saintes Ordonnances avaient échauffé toutes les têtes, en sorte que les paysans eux-mêmes, animés d’un esprit de zèle pour le soutien de la législation, étaient partout aux aguets pour arrêter les fugitifs.

Les compagnons d’Ambroise résolurent de se défendre ; et, feignant de se ranger dans un certain ordre de bataille, ils marchèrent droit à eux. Les paysans, effrayés à leur tour, prirent la fuite, et

  1. 26 avril 1686.
  2. 7 mai 1686.