entre les mains, nous le parcourûmes, il nous intéressa, et nous le mîmes en français, en usant de cette liberté honnête que doit avoir tout traducteur d’habiller les étrangers à la mode de son pays. Nous allons rapporter fidèlement cette histoire intéressante et singulière.
Ambroise Borély naquit en Cévennes, d’un bon bourgeois de ce pays-là, et fut l’aîné de sept enfants. Son père avait une fortune médiocre, et vivait modestement de son revenu ; visitant ses champs et ses prés ; allant de temps en temps à la chasse à pied, et précédé d’un seul chien ; dînant une ou deux fois toutes les semaines avec ses amis ; assistant régulièrement au prêche tous les dimanches ; et jouissant doucement du présent, sans inquiétude sur l’avenir. Louis XIV étonnait, alors l’Europe par sa magnificence et par sa gloire. Rien ne résistait à la force et au bonheur de ses armes ; ses généraux et ses ministres étaient ce qu’il voulait qu’ils fussent ; dans les fêtes brillantes qu’il donnait à sa cour, tout s’exécutait comme par enchantement ; les montagnes s’aplanissaient devant lui, et ses volontés étaient toujours ou devinées ou du moins exécutées avec une promptitude qui tenait du prodige.
On profita, comme tout le monde le sait, du goût qu’avait ce monarque pour arriver tout à coup à la fin sans se donner la peine de passer par les moyens, et de la persuasion où il était qu’il ne pouvait manquer d’être constamment