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De l’enfance de Pantagruel.

Chapitre IIII.



Ie trouve, par les anciens historiographes et poetes, que plusieurs sont nez en ce monde en façons bien estranges, que seroient trop longues à racompter : lisez le VII livre de Pline, si avés loysir. Mais vous n’en ouystes jamais d’une si merveilleuse comme fut celle de Pantagruel : car c’estoit chose difficile à croyre comme il creut en corps et en force en peu de temps. Et n’estoit rien Hercules qui, estant au berseau, tua les deux serpens, car lesdictz serpens estoyent bien petitz et fragiles. Mais Pantagruel, estant encores au berseau, feist cas bien espouventables. Je laisse icy à dire comment à chascun de ses repas, il humoit le laict de quatre mille six cens vaches et comment, pour luy faire un paeslon à cuire sa bouillie, furent occupez tous les paesliers de Saumur en Anjou, de Villedieu en Normandie, de Bramont en Lorraine, et luy bailloit on ladicte bouillie en un grand timbre, qui est encores de present à Bourges, près du palays ; mais les dentz luy estoient desjà tant crues et fortifiées qu’il en rompit, dudict tymbre, un grand morceau, comme tres bien apparoist.