Page:Rabelais marty-laveaux 01.djvu/383

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Enfans, ne pleurez goutte, il est encores tout chault. Ie vous le gueriray aussi sain qu’il fut iamais. Et ce disant print la teste & la tint sus sa braguette chauldement qu’elle ne print vent, & Eusthenes & Carpalim porterent le corps au lieu où ilz avoient bancquetté : non par espoir que iamais guerist, mais affin que Pantagruel le veist. Toutesfois Panurge les reconfortoit, disant. Si ie ne le guerys ie veulx perdre la teste (qui est le gaige d’ung fol) laissez ces pleurs & me aydez. Adonc nectoya tresbien de beau vin blanc le col, & puis la teste : & y synapiza de pouldre de diamerdys qu’il portoit tousiours en une de ses fasques, apres les oignit de ie ne sçay quel oingnement, & les afusta iustement veine contre veine, nerf contre nerf, spondyle contre spondyle, affin qu’il ne feust torty colly (car telles gens il haissoit de mort) ce faict luy fist alentour quinze ou seize poincts de agueille, affin qu’elle ne tumbast de rechief : puis mist à l’entour un peu d’vn unguent, qu’il appelloit resuscitatif. Soubdain Epistemon commença à respirer, puis à ouvrir les yeulx, puis à baisler, puis à esternuer, puis feist ung gros pet de mesnage. Dont dist Panurge, à ceste heure il est guery asseurement : & luy bailla à boire d’ung grand villain vin blanc avecques tout une roustie succrée. En ceste façon fut Epistemon guery habilement, excepté qu’il fut enroué plus de troys sepmaines, et eut ung toux seiche, dont il ne peut oncques guerir, sinon à force de boire.

Et là commencza parler, disant. Qu’il avoit veu les diables, & avoit parlé à Lucifer familierement, & faict grand chere en enfer, et par les champs Elisées. Et asseuroit devant tous que les diables estoient bons compaignons. Et au regard des damnez, il dist, qu’il estoit