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chapitre xxiii.

Epistemon avoit une main toute au dedans escorchée & sanglante par avoir en violence grande retenu un des gumènes, & entendent le discours de Pantagruel dist. Croyez Seigneur que i’ay eu de paour & de frayeur non moins que Panurge. Mais quoy ? Ie ne me suys espargné au secours. Ie consydère, que si vrayement mourir est (comme est) de necessité fatale & inevitable, en telle ou telle heure, en telle ou telle façon mourir est en la saincte volonté de Dieu. Pourtant icelluy fault incessamment implorer, invocquer, prier, requerir, supplier. Mais là ne fault faire but & bourne : de nostre part convient pareillement nous evertuer, & comme dict le sainct Envoyé, estre cooperateurs avecques luy. Vous sçavez que dist C. Flaminius consul lors que par l’astuce de Annibal il feut reserré près le lac de Peruse dict Thrasymène. Enfans (dist il à ses soubdars) d’icy sortir ne vous fault esperer par veuz & imploration, des Dieux. Par force & vertus il nous convient evader, & à fil d’espée chemin faire par le mylieu des ennemis.

Pareillement en Saluste, l’ayde (dist M. Portius Cato) es Dieux n’est impetré par veuz ocieux, par lamentations mulièbres. En veiglant, soy evertuant, toutes choses succèdent à soubhayt & bon port. Si en necessité & dangier est l’home negligens, eviré, & paresseux, sans propous il implore les Dieux. Ilz sont irritez & indignez.

Ie me donne au Diable (dist frère Ian) ie en suys de moitié (dist Panurge) si le clous de Seuillé ne feust tout vendangé & detruict, si ie ne eusse que chanté contra hostium insidias (matière de breviaire) comme faisoient les aultres Diables de moines, sans secourir la vigne à coups de baston de la croix contre les pillars de Lerné.