Page:Rabelais ou imitateur - Le Disciple de Pantagruel, éd. Lacroix 1875.djvu/32

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haine et sans faveur, on cognoistra evidemment que je suys le vray imitateur de vérité, et qu’en mes dictz y a si grosse apparence qu’il n’y aura nul qui les doibve ny ause impugner sans reprehension manifeste et sans en estre vitupéré de tous vrays hystoriographes, auxquelz je commectz le jugement de ce présent livre, lequel j’ay compilé à grosse peine et labeur, de peur de cheoir en aulcune erreur, car il n’y a gueres affaire à mentir qui ne s’en donne bien de garde pour le jourdhuy.

Or, pour venir à la matière dont il est question, il est vray que je me deliberay ung jour de voyager par la mer, pour veoir, enquérir et perscruter les grandes merveilles qui y sont, et la grande diversité des ysles, des monstres et des bestes saulvaiges et marins que l’on voit en plusieurs pays et régions estranges, et pour ce faire j’ay faict esquiparer une navire tout propre, de sorte qu’il n’y failloit riens. Car premièrement je l’ay faict garnir de bonne et grosse artillerie pour assaillir et pour défendre si besoing estoit. Et après je la fis munir de biscuit, de vins, de lardz, de beuf salé et bresil, et de toutes choses requises en tel cas et affaire.