Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/265

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Desgriel agacé raconta gravement une bouffonne histoire.

— Un jour, j’ai fait aussi mon petit magnétiseur, comme nous le faisons tous, n’est-ce pas… j’ai appelé une femme endormie, elle est venue, par suggestion, elle s’est déshabillée…

Des « oh ! oh ! » interrompirent Desgriel qui, la mine délicieusement surprise, continua en disant :

— Pourquoi ces « oh ! oh ! » vous attendez que je dise tout ! et vous savez déjà où j’en veux arriver !… Donc… elle se déshabilla, elle se coucha, elle… c’était une blonde et elle avait des caresses compliquées comme les enlacements des lianes… Bref, jamais sommeil magnétique ne me parut plus absolu… alors, je lui demandai, oubliant la suggestion, si elle dormait souvent ainsi.

« Poète, me fut-il répondu dans un éclat de rire, sept fois par semaine, et je veux bien recommencer… quand tu voudras… »

La suggestion, c’est qu’elle n’avait trouvé que ce moyen pour faire le premier pas.

Des rires étouffés circulèrent. Mais quand de Cossac, impatienté, eut fait chut ! pour indiquer qu’on pouvait troubler la séance, chacun, grave, anxieux, le front plissé, se pencha du côté de Jane Sivrac ; la petite se tordait sous le coup de fouet plein de gaieté que lui avait administré Desgriel, et elle se servait à ravir de sa rieuse pâmoison.

Un moment, dans le silence presque religieux du salon, tous ces artistes, tous ces demi-mondains eu-