Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


I


J’en eus la première vision par un jour bas et louche du dernier automne qui exhalait une haleine pourrie, un air passant sur des feuilles mortes, des bêtes en décomposition, des tas de choses immondes formant peu à peu le bon terreau d’où sortira le nouveau germe du printemps, tout frais paré, en habit vert. C’était un demi-jour préparant les yeux fatigués par tant de larmes, ou de pluie, aux crudités de l’époque à venir, et l’on voyait l’eau de la rivière presque stagnante laissant transparaître, à contre-lumière, des poissons, caressant de leur ventre d’argent des tessons de bouteilles dans la vase, des chiffons sans couleur imitant des formes de noyés. On pouvait, à la rigueur, supporter les façons décourageantes de la nature, parce que ceci représentait le