Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/192

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guettant les trains, tout à son affaire de la cantine, venant reprendre son café à la terrasse de cette auberge d’où nous regardions, épouvantés, ivres du bruit de ces caravanes et surtout de l’odeur d’étable qui s’en dégageait, les convois de ceux qui fuyaient en voiture ou à pied. Charrettes cahotantes sur le sommet desquelles le dernier né se cramponnait aux jupes de l’aïeule poussant des cris aigus, auto de maître portant des familles, vraies roulottes de saltimbanques encombrées de matelas, d’oreillers, de cages de perroquets et de chiens de salons, jusqu’aux ânes éreintés butant sous le faix des hardes, des casseroles et de la vaisselle ; il y avait là, en un lamentable défilé, tous les échantillons de locomotion animale ou… machinale. On ne s’étonnait plus. On en était.

Des gens, très bien vêtus, suppliaient pour un verre de bière, un verre d’eau… n’avions-nous pas nous-mêmes à nous reprocher d’exploiter la charité publique ? C’est en guerre que l’on sent le mieux la loi de l’égalité, parce que l’argent ne compte plus. (Oh ! quand l’argent