Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/211

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chez moi, d’écouter le silence pour essayer de deviner s’il n’y a pas une plainte qui s’y étouffe. J’entends toujours trop. Cette nuit, c’est d’un toit que me vient la plainte, faible, continue, lancinante. J’ai beau me répéter que la mort est partout, que les cris d’agonie montent de tous les coins du monde. Je ne peux pas me rendormir. Allons ! Je dois me rendormir. Je ne suis pas chez moi, ici.

Au matin, Gabrielle et moi, nous allons voir. En face, il y a une vieille grange abandonnée, une maison déserte, close, à toit bas en chapeau paillote ; une barrière cadenassée ferme son étroit jardinet. Nous entendons toujours la plainte ; elle diminue, plus timide. Nous finissons par entrevoir, près d’une cheminée, un morceau de charbon, à côté d’un tuyau où il n’y a pas eu de fumée depuis dix ans ! C’est lui, c’est le petit chat. Pauvret ! Comment a-t-il pu grimper là ? Il n’est pas venu de la cheminée, c’est impossible. Alors, j’oublie ma situation d’exilée, situation suspecte par excellence. La maison est inhabitée, rien à demander à personne :