Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/28

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qui est venu longtemps après moi. Je ne suis ni une divinité ni un démon, encore moins une femme. Je suis une forme, la première forme, le moule, et tout le reste n’est que mon apparence ou ma déformation. Je ne suis nulle part et cependant on me retrouve en tout. Honneur à ceux qui me cherchent sans se soucier des usages reçus. On me rencontre à l’improviste. Pour ne pas perdre mes traces quand on croit enfin m’avoir découverte, il faut conserver un esprit simple, car on me voit disparaître au milieu des complications sentimentales. (Comme je suis nue, j’ai horreur de certains guêpiers.) Mes plus proches voisins sont les enfants, les fous, les poètes et surtout ceux qui sont capables, ne souriez pas, d’exagération… parce que l’exagération ou l’exaltation est une fermentation de ma puissance. Dans mon glacial royaume il faut que l’eau s’agite et se corrompe d’abord pour pouvoir ensuite se résoudre en pluie fécondant les terres. Il n’est tel qu’un bon orage pour tout tonifier… À propos : que veniez-vous me demander en vous précipitant dans