Page:Rachilde - Dans le puits, 1918.djvu/82

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pas lui expliquer mon cas spécial, une si vieille histoire de cholérique, ni lui montrer ledit papier demeuré dans les tiroirs de Paris. (Il faut huit jours pour chercher un papier là-bas !…) La dame s’actionnait. « Vous ne me portez pas de papier, vous n’avez pas de recommandation et moi je n’ai pas le temps. Nous n’avons pas même de blessé. En aurons-nous, seulement ? Je comprends très bien. C’est un bon mouvement, mais vous le regretteriez. Et puis les femmes du monde ! Moi qui vous parle, je suis grainetière. Je m’y connais dans tous les achats. Nous aurons trop de femmes du monde et tellement de jeunes filles ! Ce qui nous manque… ah ! ça, ça manque toujours, c’est de l’or. » Elle ajouta, plus doucement, en dépouillant méthodiquement le fer d’un lit d’une torsade de paille : « Il n’y a plus d’or, nulle part. » Et celui de la paille jonchait la cour, piétiné par tous les déménageurs. Alors, je vidai mon porte-monnaie, contenant tout juste cinquante-deux francs soixante-cinq centimes, dans la poche large