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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/108

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que je m’y jetterais, bien heureuse, en vous remerciant, et voilà, mon père, de quel amour je me régale ! Il faut, n’est-ce pas, que je sois une insatiable de caresses, une amante que rien ne rebute pour me contenter de cet amant !… Oh ! je ne lui reproche pas sa laideur ! Il m’aime tendrement et fait tout son possible pour dissimuler cette honte, mais, moi, je crois que je le verrais tel qu’il est quand il se fourrerait à cent pieds sous terre…

— Mon Dieu ! Mon Dieu ! proféra le confesseur, laissant tomber son front dans ses mains. Et pourquoi ne rompez-vous pas cet attachement qui vous dégrade, ma fille ? Si ce garçon vous a séduite malgré vous, il a fait un crime, et vos parents auraient le devoir de le chasser de chez eux sans qu’il puisse réclamer ni se venger. Vous ne voudriez pas épouser ce clerc ? Alors… il vous menace ? Vous avez peur du scandale ? Dites-moi, mon enfant, que vous voulez rompre… ou que vous avez peur…

— Vous ne comprenez pas, mon père ! C’est de bonne volonté, au contraire, que je suis sa maîtresse. Je me suis donnée à lui parce que je ne me sentais pas la force de lui résister… J’ai même été le chercher, un jour qu’il ne pensait plus à moi et qu’il n’espérait pas me retrouver…

— Il faut le quitter… le quitter… répéta le prêtre fiévreusement. Laure, mon enfant, avouez tout à votre mère, et, de concert avec elle, je me charge de l’expulser du pays, ce monstre ! Vous êtes jeune, sensible, un peu folle, vous reviendrez de vos