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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/265

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— Voyez-vous, ça finira mal, tout est chambardé, balbutia-il. Je travaille plus, je bois plus, je mange plus… j’ai gâché des montures, le patron a fait du potin… et, par-dessus le marché, mon oncle est venu et m’a dit que j’avais la tête d’un qui fait la noce ! Elle est chouette, ma noce, à moi ! je l’aurais bien étranglé ; C’est un fouinard, l’oncle, il s’occupe de ce qui ne le regarde pas, pire qu’un gendarme ! Il prétend que j’ai une toquade pour le jupon, et il me serre le frein en me prenant mes économies, rapport à la gosse, ma cousine, qu’il me collera un jour.

— Est-elle gentille, au moins, sa gosse ? demanda familièrement Laure parlant comme lui.

— Oh ! là ! là ! plate à rendre jalouse une limande, et l’air d’avoir bu du vinaigre !… Je n’en n’ai guère envie…

— Tu es encore un gamin, tu as le temps de songer au mariage, toi !

— Moi, je suis une crapule, conclut brutalement le jeune garçon.

Et il la regarda, un peu effrayé de ses propres pensées.

— On voit passer des femmes dans des voitures, soupira-t-il, qui sont comme de jolis fruits dans une corbeille, et faut pas toucher !… On n’a ni l’argent ni les habits pour leur causer ! Jamais gratis, les femmes ! Ou alors c’est des gueuses !… Quelquefois, on se toque d’un petit chiffon d’atelier, on lui fait un enfant et on s’en mord les