Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/111

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avait de brusques révoltes, évaporant une colère factice que les personnes sensées prenaient pour les accès d’une fièvre héréditaire. Le bruit courait qu’elle buvait des élixirs mystérieux. On ne lui avait jamais vu boire quoi que ce fût de suspect, d’ailleurs. On lui attribuait une origine slave mais elle était, au contraire, du midi de la France, d’une famille de riches gardians de taureaux ; elle venait des ferrades qui fournissent les meilleurs joûteurs aux arènes espagnoles.

La duchesse Lionnelle de Montjoie s’appelait ainsi parce que son mari s’appelait ainsi, rien de plus, rien de moins. Et il l’avait sacrée princesse bien authentique en se séparant d’elle trois mois après leur mariage. Pourquoi ? Cela s’était accompli sans scandale. Le Monsieur s’était retiré, avec autant de noblesse qu’il était venu, dans cette famille de dompteur, certainement aussi noble que la sienne mais plus farouche. Il avait eu toutes les peines du monde à faire accepter un douaire que les parents de la mariée voulurent doubler, de leur côté, afin que leur fille fût assurée de ne pas tout tenir de… l’acheteur. Puis il était parti en mission diplomatique. De toutes les