Page:Rachilde - L’Hôtel du grand veneur, 1922.djvu/216

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

née par la peur des gendarmes. Elle ne songeait plus qu’aux papiers de justice.

— Dommage, dit-il froidement, qu’elle oublie de refaire mon lit… c’est son métier pourtant… et il va falloir que vous y dormiez, madame la duchesse, vous êtes certainement malade, vous qui n’aimez pas le sang. Ah ! ma pauvre faisane dorée, c’était pas comme ça que je rêvais de ma nuit de noces ! ajouta-t-il, en lui tendant les bras.

Lionnelle eut une révolte, essaya de fuir à son tour, mais elle ne put que se laisser porter dans l’étrange nid d’aigle qu’elle ne connaissait point, la chambre nuptiale.

C’était tout rond, sans autre issue que cette fente de la roche, et au milieu, il y avait un tas de mousse souple et doux comme le meilleur des divans. Un fusil était accroché au-dessus. On y voyait à peine quand on regardait du côté de la porte et on n’y entendait rien, ni le bruit du barrage, ni le murmure des feuilles du bois surplombant l’entonnoir, où le ravin qui y conduisait. Un calme effrayant y régnait, une sensation de sécurité… mortelle, le même calme qui permettait à ce grand fauve de contempler sa proie enfin conquise.