Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/239

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affaire de temps. Le médecin, que mon père envoyait quelquefois, me faisait, seul, prendre patience, car il n’avait guère d’espoir de guérison. Je comptais sur ma fin prochaine comme sur la délivrance de mes maux. Mais quelle est la créature qui peut s’écrier en face de la tombe : « C’est fini ! »

Il y avait dix mois que ma sœur était morte.

Henry avait près de deux ans. L’enfant courait, jouait, grandissait près de moi, sans se douter que cette femme, qui l’élevait si tendrement avait été cause de tous les malheurs qu’il comprendrait plus tard et dont il lui ferait, si elle existait, de sanglants reproches. Je le gardais sous mes yeux, nuit et jour. Je l’aimais comme on aime, lorsqu’on sait que d’un moment à l’autre, on va être séparé brusquement de l’objet de son affection. Je ne cherchais pas à lui inspirer la moindre tendresse pour moi ; au contraire, je me cachais souvent pour pleurer quand l’innocent m’appelait sa mère et qu’il me caressait ; ne devait-il pas maudire ma mémoire, une fois devenu homme ?

Je n’avais aucune nouvelle de James. Le