Page:Rachilde - L’Homme roux, suivi de La Fille de neige, 1888.djvu/89

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Mon père descendait de cheval comme je sortais sur le perron.

Il vint m’embrasser, et, tout en caressant Burrague, il me raconta qu’il avait eu un affreux cauchemar pendant la nuit :

— Il me semblait, dit-il, que dans cette épouvantable tourmente j’entendais le bruit de pleurs et de cris ; on ouvrait des portes, on les fermait ; je ne pouvais dire si j’étais éveillé ou endormi, car j’entendais fort distinctement des agitations dans le cottage.

Il me disait cela d’un ton si tranquille, le pauvre père ! Il ajouta :

— Ma promenade m’a fait grand bien, ce matin. Je me suis levé très abattu ; maintenant, je me sens très dispos.

Il entra au salon, sans voir que je chancelais en m’éloignant de lui. Je fis moi-même une courte promenade sur la pelouse ; l’herbe, sèche et gelée, criait sous mes pas ; le froid était piquant, mais cet air vif me procura un grand soulagement physique. Il colora mes joues et ranima mon regard.

Le déjeuner ne fut qu’un long supplice. Il ne fallut expliquer l’absence de Madge, il me