Page:Rachilde - La Découverte de l’Amérique, 1919.djvu/208

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour y surveiller les taillis et y découvrir les traces de cet insaisissable chenapan qui nous prenait nos lapins, nos lièvres, jusqu’à nos biches, au collet. Mon père ne lâchait jamais une piste quand il pensait tenir la bonne et comme ses gardes, deux vieux malins, se prétendaient fourbus, il mettait son amour-propre à mieux conduire la chasse, désireux d’en relever le défaut. On ne voyait jamais ce braconnier. On rencontrait seulement des touffes de poils ou de plumes signalant ses dégâts ou des entrailles encore chaudes des bêtes volées, le bandit ayant la triste habitude de faire sa cuisine en plein air aux risques de propager des incendies dans la région. Des bruits fâcheux circulaient à son sujet. On racontait, chez les paysans, que pour l’honneur de la famille, il serait préférable de ne pas le punir. Il jouissait d’une sorte d’immunité singulière lui conférant un droit du seigneur qui commençait à inquiéter mon père, peu patient de son naturel.