Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/108

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beaucoup de ce genre, et le pire qui pût lui arriver fût qu’elle se mît à brûler elle-même pour le bon motif. Il se trouvait dans le délicieux état de l’homme qui ne cherche plus à boire parce qu’il est déjà un peu gris, mais pas assez pour ne plus oser boire. Il attendrait l’occasion. Cet esprit de femme, pimenté comme une liqueur de ses îles chaudes dont elle rêvait tout haut, l’amusait énormément. Il avait franchi une barrière, laissait derrière lui l’attirail du convenu amoureux, cette galanterie banale qui force le Monsieur à prendre un aspect pantelant, un brin ridicule quand on lui résiste au nom d’une vertu également de convention. Elle lui déclarait tous les droits… sauf celui de les exercer. Il restait le maître, l’attendu, le dominateur. Elle s’agenouillait devant lui, proférait des paroles magiques, répandant le parfum puissant et troublant d’une incantation, et, malgré son attitude servile, elle demeurait bien, en effet, la maîtresse, celle qui enseigne l’amour.

Ils se dirigèrent du côté opposé au salon vieux-rose, où trônait, mystérieusement fantômal, ce vase blanc dont le souvenir humiliait encore Léon. Éliante ouvrit une porte sous une autre draperie vert d’eau.

— Depuis la mort de mon mari, dit-elle d’une