Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/19

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Pourquoi ? Elle ne connaissait donc jamais personne ? Et en la conduisant au buffet, en éprouvant un frisson de véritable angoisse à la sentir si noire, si fermée, il ne lui avait rien dit.

Une fois, chez une baronne d’Esmont où il s’était glissé, toujours pour la suivre, il trouvait son carnet de bal sous sa chaise, des cartes, les siennes, il lisait enfin ce prénom : d’Éliante, et cela le faisait un peu ricaner :

— Manque plus que ça ! Elle s’appelle Éliante. C’est rien datant.

Et tout en se blaguant, il prenait une carte, la volait, la gardait pour la relire le matin.

— Qui ça peut-il être, cette femme-là ?

Cela ne lui suffisait pas que ce fût une femme.

Maintenant il se précipitait dans la rue, n’attendant pas la fin de la fête, demeurait tête nue sous une pluie battante.

— Il pleut. Nom d’un chien !

Planté au milieu du trottoir, n’ayant pas l’idée de mettre son claque parce qu’il fallait en détendre le ressort et qu’il redoutait cette complication bruyante, il jurait.

Le coupé stationnait devant lui.

Elle montait en voiture, arrangeait le flot noir de la robe, les flots multicolores du manteau, et faisait jaillir des jupons légers, très blancs, de la mousse de champagne.