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Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/27

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Alors, comme elle montait les marches d’un perron, elle le prit au bras, le poussa, le dirigea le long des caisses de grandes plantes tout humides.

— Là… nous sommes arrivés, souffla-t-elle. J’habite le rez-de-chaussée, eux, sont en haut, rien à craindre une fois dedans : les plafonds sont ouatés.

— C’est prudent, railla-t-il.

Ils se trouvèrent dans une salle à manger ronde, éclairée par une grosse tulipe jaune, que l’index d’Éliante fit s’épanouir au-dessus d’une petite table délicatement servie.

Un seul couvert, mais deux perdreaux, deux jattes de crème, deux compotiers de gâteaux et de fruits, — les gâteaux, de formes bizarres, les fruits, superbes. — Il faisait chaud ; des tentures de soie verte ruisselaient en plis ondulés du plafond comme des feuillages de saule, des étagères dressaient des cristalleries nuancées et fluides, on ne voyait ni porte ni fenêtre et un tapis épais, d’une mollesse de gazon, emprisonnait les chevilles. On eût dit un bout de jardin l’été, au crépuscule, un coin de jardin tiède, tout argenté par des reflets de lune.

— Ne pensant pas avoir le plaisir de vous ramener, cher Monsieur, il n’y a qu’un couvert. Souffrez que je le dédouble. Je n’aime